Léonard LIMOSIN (1505- 1575/1577) Achille et Léandre Émaux peints polychromes et translucides avec rehauts d’or sur cuivre 30 x 26 cm Limoges, vers 1564. 150 000 / 200 000 € chaque plaque | |
Provenance Très probablement commandés pour, ou par, Catherine de Médicis (1519-1589), reine de France. Installés dans le « cabinet des émaux » de son hôtel à Paris, vers 1575 ; Baron Mayer Amschel de Rothschild (1818-1874), Mentmore Towers ; Hanna de Rothschild (1861-1890), mariée en 1876 à Archibald Primrose, 5e comte de Rosebery (1847- 1929), Mentmore Towers ; Harry Primrose, 6e comte de Rosebery (1882-1974), Mentmore Towers, Sa vente : Sotheby Parke Bernet & Co. Mentmore Towers. Vol. II, « Works of Art and Silver », 20 mai 1977, lot 1097 ; Collection privée, USA, Sa vente : Sotheby’s New York. Important European Works of Art. Vol. I, 27 novembre 1981, lot 48 ; Collection privée européenne. Bibliographie Edmond Bonnaffé. Inventaire des meubles de Catherine de Médicis en 1589. Paris, 1874. Mentmore. R. & R. Clark, Édimbourg, 1884 (édition privée de l’inventaire), vol.II, p. 118, n° 44 & 46. Philippe Verdier. Catalogue of the Painted Enamels of the Renaissance. The Walters Art Gallery, Baltimore, 1967, n° 105-106, pp. 172-175. Thierry Crépin-Leblond. « Une suite de portraits mythologiques émaillés par Léonard Limosin », in Revue de l’Art. 1997, n°116, pp. 17-26. Thierry Crépin-Leblond & Stéphanie Deprouw. De la Lettre à l’émail. Léonard Limosin interprète Ovide. Catalogue d’exposition, musée national de la Renaissance, château d’Écouen, 2010. |
Ces deux grands portraits rectangulaires, sur fond bleu, représentent des figures inspirées par les Héroïdes d’Ovide, œuvre littéraire qui a profondément marqué la Renaissance en Europe. Réalisées vers 1564 par Léonard Limosin, l’émailleur le plus talentueux du XVIe siècle au service de la Cour, ces plaques pourraient, comme l’expliquent Thierry Crépin-Leblond et Stéphanie Deprouw dans le catalogue de l’exposition “De la Lettre à l’émail. Léonard Limosin interprète Ovide” organisée en 2010 au musée national de la Renaissance à Écouen, avoir été offertes à Catherine de Médicis par Louise de Clermont, une proche confidente de la reine. Elles pourraient aussi avoir été commandées par la reine elle-même, grande passionnée d’émaux de Limoges. À sa mort, l’inventaire de la reine fait état de 259 pièces d’émail, témoignant de son intérêt pour cet art raffiné. Cette série de plaques explore les thèmes de l’abandon et de la solitude amoureuse, en résonance avec la propre vie de Catherine, veuve inconsolable d’Henri II. Les plaques des Héroïdes décoraient certainement les lambris du «cabinet des émaux» de sa résidence parisienne, aménagée à partir de 1570 sous la direction de l’architecte Jean Bullant (aujourd’hui à l’emplacement de la Bourse du Commerce et dont seule la colonne « Médicis » a été préservée). | Portrait de Catherine de Médicis par Corneille de Lyon (vers 1536). |
Dans les Héroïdes, Ovide adopte une approche épistolaire inédite pour l’époque, présentant une série de lettres fictives écrites par des figures féminines mythologiques ou historiques, souvent confrontées à l’absence ou à l’indifférence de l’être aimé. Véritable innovation poétique, cette œuvre a connu un succès grandissant, influençant aussi bien la littérature que l’art en Europe à la fin du Moyen Âge et à la Renaissance. Avec la montée de l’Humanisme, ce texte connaît une diffusion exceptionnelle, dépassant même en nombre d’éditions les célèbres Métamorphoses du même auteur.
L’ensemble de plaques réalisé par Limosin autour de 1564 traduit cet engouement pour le texte d’Ovide parmi les cercles érudits de la Renaissance et l’esprit humaniste du siècle, qui valorise la dimension universelle des sentiments humains. De dimensions similaires et toujours sur fond bleu, elles représentent des portraits de personnages en buste, leurs vêtements et coiffures variant entre styles antiques et contemporains.
Nos plaques représentent Achille et Léandre, qui incarnent chacun, à leur manière, des idéaux de courage, de passion et de tragédie. Achille, héros de la guerre de Troie, est épris de Briséis, une captive troyenne. Le couple est au cœur du conflit initial de l’Iliade : lorsque Agamemnon, chef des Grecs, force Achille à lui céder Briséis, il se retire du combat, ce qui affaiblit les Achéens et déclenche une série de tragédies qui forment la trame de l’épopée d’Homère. Léandre, quant à lui, par amour pour Héro, une prêtresse d’Aphrodite, traversait chaque nuit à la nage le détroit de l’Hellespont, jusqu’à ce qu’il périsse lors d’une tempête.
Après avoir décoré les lambris du cabinet des émaux de Catherine de Médicis, ces plaques entament un parcours de collections remarquables. On retrouve leur trace dans la vente des collections de Mentmore Towers en 1977, propriété de la famille Rothschild.
Organisée pour la succession d’Harry Primrose, 6e comte de Rosebery, la vente comportait de nombreux émaux de Limoges, qui avaient été collectionnés passionnément par le baron Mayer Amschel de Rothschild, puis transmis à sa fille Hanna. Puis, en 1981, elles réapparaissent dans une vente chez Sotheby’s à New York. Elles sont depuis, conservées dans une collection privée européenne.
Aujourd’hui, 17 plaques sur 32 sont arrivées jusqu’à nous : 13 sont dans des collections publiques françaises (notamment au musée national de la Renaissance d’Ecouen qui a préempté la plaque représentant Pâris lors la vente Yves Saint Laurent et Pierre Bergé chez Christie’s en 2009, et fait l’acquisition de celle représentant Ulysse auprès d’un collectionneur en 2012), 2 plaques au Walters Art Museum de Baltimore, les 2 nôtres sont les deux dernières connues en mains privées.
Léonard LIMOSIN (1505- 1575/1577) Léandre Émaux peints polychromes et translucides avec rehauts d’or sur cuivre 30 x 26 cm Limoges, vers 1564. 150 000 / 200 000 € | Léonard LIMOSIN (1505- 1575/1577) Achille Émaux peints polychromes et translucides avec rehauts d’or sur cuivre 30 x 26 cm Limoges, vers 1564. 150 000 / 200 000 € |
Grande aiguière en verre « calcedonio » Venise, vers 1500. H. 28 cm 150 000 / 200 000 € | Exceptionnelle coupe en sardoine montée en or émaillé La coupe : art byzantin, IXe-XIe siècle La monture : Paris, vers 1665 (atelier « blanc et rose ») H : 18 cm 80 000 / 120 000 € | |
Outre ces plaques, la vente du cabinet des merveilles comprend d’autres pièces exceptionnelles, offrant ainsi un voyage à travers les époques et les cultures. Une aiguière en verre marbré Calcedonio, réalisée à Venise vers 1500, fait partie des lots les plus précieux. Cette technique complexe imite les motifs de l’agate avec une finesse remarquable. On ne connaît que sept aiguières en calcedonio de ce type, principale- ment conservées dans des musées en Italie, en Allemagne, en Angleterre, en Russie, et aux États-Unis. La forme de ces aiguières est inspirée de pièces métalliques ottomanes. | Parmi les autres trésors figure une exceptionnelle coupe formant coquille, élaborée à partir d’un fragment de coupe byzantine en sardoine cannelée du IXe-Xe siècle et d’une monture réalisée à Paris vers 1665. Surmontée d’un jeune Neptune en or émaillé et décorée d’éléments floraux en émail, l’œuvre est attribuée à l’atelier blanc et rose en raison de sa technique et de son ornementation caractéristique. Des pièces similaires, issues des collections de Louis XIV, sont conservées au Louvre. |
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